Le Red Star retrouve cette saison son stade Bauer après une saison en Ligue 2 passée dans l’enceinte lointaine mais homologuée de Beauvais. Pour ce derby face à Créteil, la tribune est a donné tout ce qu’elle pouvait pour encourager son Etoile rouge.
46e minute de jeu, le stade Bauer exulte. Il ne vient pas d’assister au premier but de ce derby très disputé mais au carton rouge d’un joueur adverse. Après une poignée de secondes en deuxième période, les audoniens pensaient avoir fait le plus dur en obtenant cette longue supériorité numérique à venir.
Il faut attendre vingt minutes avant le coup d’envoi pour sentir une atmosphère de derby au sein du stade Bauer. Alors que les gradins se remplissent, la tribune visiteurs placée à l’extrémité de l’enceinte et aux côtés des tribunes vétustes et abandonnées à la nature laisse apparaître les torses nus des quelques dizaines de supporters cristoliens et leurs banderoles.
On est à la fois tout proche du monde professionnel car le Red Star descend tout juste de Ligue 2 et bénéficie encore de ce statut mais cette enceinte en partie laissée à l’abandon rappelle que le monde amateur n’est pas si loin non plus d’un point de vue architectural comme sportif. Seulement huitième de National 1 avant la rencontre, l’Etoile rouge doit gagner pour s’éviter de croire un instant en l’impensable dans un championnat où les quatre derniers sont relégués.
En face d’eux, la tribune est commence enfin à s’agiter, les premiers ultras et drapeaux parviennent à se montrer. Pour raccompagner les joueurs au vestiaire après l’échauffement, les supporters des deux équipes franciliennes entonnent des premiers chants et lancent alors leur rencontre. Les enceintes, qui crachaient du gros son – comprenez du rap – pour couvrir le bruit des mouvements de foule et pour faire monter la température, se taisent alors.
La tribune est, noire de monde, se lève et démarre son spectacle pour réchauffer tout un stade. En réponse aux chants insistants des supporters de l’USCL placés de l’autre côté du rivage, la foule toute entière s’échauffe brutalement la voix en attendant un impressionnant enfumage.

« C’est la fierté de nos couleurs, qui nous a donné la ferveur, pour notre équipe et son honneur, à Bauer comme à l’extérieur, toute la tribune reprend en coeur, allez Red Star allez allez ! »
C’est à l’entrée des joueurs qu’on goûte à une nouvelle saveur au cœur de cette tribune chaude et chaleureuse. Les fumigènes, de couleur classique rouge ou bien locale verte et blanche, permettent aux supporters de marquer leur territoire et leur unité puisqu’on y voit absolument rien à part les visages de nos voisins lorsque la fumée est répandue aux quatre coins de la zone des ultras. Inutile de préciser qu’il faut être debout sur ces blocs de bétons faisant office de bancs pour entrapercevoir le rectangle vert. Le coup d’envoi donné, la tribune chantera sans discontinuer pendant quarante-cinq minutes des paroles reprises par tous et en boucle.
Le contraste avec la tribune d’en face est assez saisissant. De l’autre côté du terrain, la tribune de Créteil, perdue au milieu d’une architecture déserte ne pèse en effet pas lourd dans ce vacarme malgré toute la détermination de ces fidèles supporters. Ces derniers passeront même toute la seconde période à trembler et à attendre impatiemment le coup de sifflet final. Car leur sentinelle Pereira sera exclue juste après la reprise pour une semelle haute, ce qui fera le plus grand bonheur de Bauer qui a obtenu le rouge qu’il réclamait.
La domination espérée aura bien lieu mais malgré tout le soutien du public qui a poussé jusqu’au bout, les locaux ont déçu et ne se seront même pas montré très dangereux avec cet avantage de poids. Auparavant, seule une claquette de Veron sur une tête d’Arab pour le Red Star a fait vibré les supporters audoniens. Mais sur ce synthétique, s’il n’y a pas eu une pluie d’occasions, les deux équipes ont livré une grosse bataille, notamment au milieu de terrain. Ils auront montré ce que pouvait être l’intensité d’un derby en dépit d’une qualité technique pas toujours bien rodée.

Les supporters de Créteil présents au stade Bauer.
Les nouveaux fumigènes brandis à la reprise et en fin de rencontre ne réussiront pas à changer le destin de la rencontre et à transcender davantage des locaux décidément trop justes. Le but tant attendu n’arrivera jamais et aurait même pu venir de l’USCL si Charruau n’avait pas réussi une sortie déterminante célébrée par Bauer presque comme un but. Les chants avec ou sans tambour, bras tendus et clappement de mains ou non, lancés debout ou assis, rythmeront une fin de rencontre sur la pelouse poussive voire passive d’un côté comme de l’autre. Entre deux bières ou deux cigarettes, les supporters se tendent gentiment et eux aussi comprennent petit à petit que leur équipe n’y arrive pas face à un adversaire très solide même à dix contre onze.
Après s’en être pris aux « flics, arbitres et militaires » et puis une nouvelle fois à la police que « tout le monde déteste », la tribune est accompagnera le salut de ses joueurs par une attention toute particulière à son ennemi juré, le Paris FC, avant de quitter le stade sur un dynamique « Liberté pour les Ultras ». L’explication tendue entre certains joueurs et certains supporters passée, on a vite envie de penser à autre chose qu’à ce derby décevant, en témoigne la rentrée des joueurs au vestiaire sur de nouveaux encouragements.
Même si Verdier n’aura quant à lieu même pas eu l’envie et l’élégance de saluer ses ultras malgré les mots de son capitaine Mendy. En face, un nouveau contraste est assez perceptible puisque les joueurs cristoliens communient avec leurs supporters et célèbrent ce match nul solidaire comme un succès.
Lorsque l’enceinte du Red Star se vide, dans le calme, la vie reprend son cours comme si de rien n’était à Saint-Ouen. Les derniers supporters traînent sur le parking, peuvent même discuter avec certains joueurs mais regagnent pour la plupart l’Olympic, le bar QG de l’Etoile rouge déjà investi de vert et blanc avant la rencontre. La déception de cette contre-performance a rapidement laissé place au scepticisme pour la suite de la saison. Le Stade Bauer a connu des jours meilleurs. Malgré sa ferveur, il va devoir patienter pour retrouver le sourire.