Alors que l’équipe Sky se dirige vers un doublé presque trop facile sur le Tour, comment ses adversaires, qui ont l’air presque résignés, peuvent bousculer la hiérarchie instaurée par Thomas et Froome sur la dernière semaine de course ?
Former une alliance
Pour la battre, il suffit peut-être à toutes les équipes de leaders de faire un plan commun anti-Sky. Des formations comme Movistar et Lotto NL-Jumbo, voire AG2R La Mondiale ont plusieurs leaders placés au général. Cela fait des forces et des arguments en plus pour tenter de renverser l’équipe britannique. Ces équipes pourraient alors se relayer et collaborer ensemble à travers les divers changements de rythme et stratégies de course pour mettre à mal l’équipe de Chris Froome et Geraint Thomas qui, à part les sifflets et les chahuts des spectateurs dû à la situation éthiquement floue de son leader, n’est vraiment pas inquiétée. Puisque Sky est beaucoup trop forte, les équipes doivent comprendre qu’elles n’arriveront pas seules à la renverser et que c’est ensemble qu’elles pourront espérer changer la donne. Pour le spectacle et le panache, il serait intéressant que Movistar, Lotto NL-Jumbo, AG2R et les autres aident Tom Dumoulin dans son refus d’abdiquer face à une formation pour l’instant supérieure à toutes.

@ Sirotti
L’épuiser moralement et physiquement
Laisser l’équipe Sky imposer son tempo du début à la fin des étapes n’est sûrement pas la meilleure solution pour tenter de la surprendre et partir dans un raid perdu d’avance. Ce n’est pas comme si les leaders tels que Bardet, Roglic ou Landa étaient complètement seuls en montagne à l’image d’un Dumoulin qui semble être l’unique coureur à vouloir contester cette suprématie. Il ne serait donc pas idiot de sacrifier certains équipiers de luxe tels que Valverde, Kruijswijk, Latour ou même Quintana, soyons fous, pour épuiser les équipiers du maillot jaune, encore trop nombreux dans le final de chaque étape de montagne. Il s’agirait d’attaquer pour les mieux placés au général assez tôt dans les étapes ou d’imposer un tempo infernal pour les autres. Les équipiers de la Sky seraient alors contraints à rouler pour revenir et se fatigueraient ou seraient distancés avant d’aborder le final des étapes pyrénéennes.
La surprendre
Dans le cyclisme d’aujourd’hui, il y a souvent autant de spectacle sur les étapes venteuses et dans les descentes que dans les cols, il faut donc surprendre et s’adapter à tous les terrains pour créer des écarts. Attaquer en milieu ou fin de cols ne semble plus une solution efficace pour les adversaires de Froome et Thomas. Il faudra partir de plus loin ou autrement. Les descentes sont par exemple propices à des attaques et Bardet ou Roglic sont très à l’aise dans ce domaine. Jusqu’à l’arrivée de dimanche sur les Champs-Elysées, il y aura encore beaucoup de descentes longues et dangereuses ce qui peut donner des idées à certains leaders. Faire des écarts ou pousser les Sky à prendre des risques incitera sans doute certains à attaquer au sommet des cols « en facteur » – à savoir pendant un temps mort – ou après avoir mis son équipe en tête de peloton. La dernière véritable étape de plat jeudi pourrait aussi voir des tentatives pas forcément prévues. Une tentative de bordure ou pourquoi pas une attaque surprise dans une cote de quatrième catégorie sont en effet des coups à tenter. La dernière semaine offre donc des possibilités infinies de créer des écarts et de surprendre une équipe Sky encore trop sereine et trop peu mise en danger.

@ Reuters
Créer une mésentente
Le plus gros danger pour la Sky vient peut-être d’elle-même. Jusqu’ici, toute l’équipe assure que Chris Froome est le leader, comme prévu depuis le départ. Mais son coéquipier maillot jaune Geraint Thomas semble supérieur à lui sur les deux premières semaines et des tensions pourrait apparaître si le Gallois venait à maintenir cet état de forme en troisième semaine. Les équipes qui visent le podium ou la victoire devront jouer sur cet aspect et mettre les deux Sky dans l’embarras. Si un leader venait à s’échapper et que les deux compères n’avaient plus d’équipier à disposition, qui viendrait à rouler ? Pour mettre ce doute, les outsiders du Tour doivent laisser faire la Sky et ne surtout pas collaborer avec elle. Ce n’est peut-être pas une tactique vraiment glorieuse, mais pour battre ces deux-là, nul doute qu’il faudra être plus malin à défaut d’être meilleur intrinsèquement que cette paire britannique infernale. Pour la renverser, les coureurs doivent laisser toutes les responsabilités à cette équipe qui écrase pour le moment la course et tenter de mettre ses deux leaders dos au mur, par exemple en les laissant se tirer la bourre dans les cols.
Briller en contre-la-montre
Ce point ne concerne essentiellement que deux coureurs, à savoir ceux qui suivent le duo Thomas-Froome au classement général. Tom Dumoulin, champion du monde du chrono, et Primoz Roglic, son dauphin aux Mondiaux, grands spécialistes du contre-la-montre, sont les seuls à pouvoir rivaliser avec les deux Sky sur cet exercice. La veille de l’arrivée à Paris, samedi, un tracé de 31 kilomètres dans le pays basque figera définitivement les positions de cette Grande Boucle. Si l’écart de ces deux coureurs descend ou se stabilise avec les leaders du classement général dans les étapes pyrénéennes, ils pourront espérer refaire une partie de leur retard. Sauf que le parcours est loin d’être plat et il faudra avoir de bonnes jambes pour passer les difficultés et espérer gagner du temps. En ce qui concerne les Bardet, Landa & co, le profil escarpé sera à leur avantage puisque cette épreuve n’est pas d’habitude un de leur gros point fort. Mais il leur faudra signer une performance énorme pour reprendre un temps conséquent à Froome et Thomas, à moins que ces derniers ne soient dans un très mauvais jour. Quoi qu’il en soit, pour gagner un Grand Tour aujourd’hui, il faut à la fois savoir grimper et être performant en contre-la-montre, ce que l’équipe Sky fait parfaitement jusqu’ici.