Rencontre avec Valentin Lavillenie

Le perchiste Valentin Lavillenie, grand espoir français de sa discipline, a eu la gentillesse de répondre à mes questions. Il parle de ses débuts, de ses ambitions pour cette année olympique et dévoile ses objectifs de carrière.

Avant toute chose, comment vous sentez-vous après votre chute aux Championnats de France en salle (27/02) ?

Ça va mieux, j’ai encore plusieurs rendez-vous avec des médecins pour ne plus avoir aucune douleur. J’ai encore quelques petites contractures, des courbatures dans le cou, dans la nuque et dans le dos, je reste donc prudent pour le moment.

Que s’est-il passé exactement ?

A mon deuxième saut à 5,50m, je viens taper la barre parce que ma perche est souple et quand je retombe sur le tapis je ne veux pas retomber sur la barre pour ne pas me faire mal. En esquivant la barre avec mon dos, je lâche ma tête qui heurte le tapis à pleine vitesse ce qui me fait un coup du lapin. Donc j’ai eu des petites nausées, des petits malaises, je n’étais pas bien, plus vraiment en forme.


Qu’est-ce qui vous a donné envie de pratiquer ce sport et à quelle époque ?

Mon père était perchiste, je faisais beaucoup de sports. J’étais un peu turbulent, il fallait que je me canalise donc j’ai fais de l’athlétisme, j’ai pratiqué un peu toutes les disciplines : des cross, du lancer de javelot, mais je n’étais pas très bon. Par mon père, j’ai forcément été attiré par la perche. J’ai commencé l’athlétisme vers 13-14 ans et uniquement la perche en 2010.

A quel moment avez-vous envisagé de faire carrière en saut à la perche ?

On envisage jamais de faire une carrière. Soit tu es bon et cela s’engage tout seul, soit tu n’as pas le niveau et tu pratiques ton sport uniquement pour le plaisir. Il n’y a pas eu d’élément déclencheur où je me suis dit que j’allais faire carrière. Progressivement j’ai abandonné les autres disciplines pour ne faire que de la perche, j’étais avec les meilleurs et j’ai donc continué. Cela vient tout seul avec les résultats.

Avez-vous une autre activité professionnelle à côté de la perche ?

Je ne fais que ça : m’entraîner et sauter. Je n’ai pas d’autre travail à côté. Je prépare mon avenir mais je ne pratique que le saut à la perche.


Est-ce que le fait d’avoir un frère comme Renaud vous aide au quotidien pour vous entraîner, vous motiver ou progresser ?

Non, pas du tout, ce n’est pas lui mon entraîneur, j’en ai un qui connaît très bien son métier. C’est plus lui qui m’aide à progresser. Le fait d’avoir Renaud en tant que frère ou pas ne change rien, c’est comme ça pour tous les perchistes français. Je ne suis plus focalisé sur lui donc ce n’est pas un avantage. Cela aide un peu au début de par ses conseils mais après c’est moi qui m’entraîne et qui saute. Il donne des conseils puis après je fais mon expérience. Cela a le même impact que pour tout perchiste qui s’entraînerait avec lui. Je suis focalisé sur moi, et n’essaie pas de me servir de lui donc ça ne change rien !


Participer aux Jeux de Rio est-ce simplement un rêve ou une réelle ambition pour 2016 ?

Je n’ai pas envie de dire que c’est un rêve car un rêve n’est pas vraiment concret. Pour moi, c’est clairement un objectif auquel je me prépare. Ce n’est pas quelque chose de surréaliste parce que les minimas ne sont pas élevés (5,70m). Ils sont aussi haut que ceux des Championnats du Monde de l’an dernier, que j’ai réalisé, même si je n’ai pas pu y participer à cause de ma main. Donc ma participation aux Jeux est un objectif. C’est la chose à laquelle je pense tout le temps.

En cas de qualification, quel sera votre objectif au Brésil ?

L’objectif sera d’être fort. La saison d’hiver ne s’est pas finie comme je l’espérait, donc c’est dur de donner un objectif pour quasiment dans six mois. L’objectif est d’y aller puis de ne rien regretter et jouer avec mes forces, tout donner. J’ai envie de me qualifier mais de ne pas me dire que j’aurais pu mieux faire. Pour le moment, il faut tout faire pour se qualifier et rester les pieds sur terre. Tant qu’on n’y est pas, il ne faut pas trop y penser. Le jour où on y est, il faut faire les choses comme il faut.

Avant cela, comptez-vous participer aux Mondiaux en salle (17-20 mars) ?

Non, car j’ai raté ma saison d’hiver. Avec ce que j’ai fait aux Championnats de France, je n’ai pas pu défendre mes chances de me qualifier. Et puis comme c’est tard dans la saison hivernale, ce n’est pas forcément très grave. Quand j’ai commencé ma préparation, ce n’était pas un objectif parce que je ne savais pas où j’en étais, j’avais besoin de temps. Je ne regrette pas de ne pas y aller. D’ici là, je ne ferais pas de compétition parce que je ne peux pas m’entraîner depuis mon petit traumatisme, je garde quelques douleurs. Je ne suis pas frustré de ne pas participer aux Championnats du Monde.

Votre record est de 5m80 en salle (et 5m70 en plein air), quelle marque vous fixez-vous pour cette année ?

Je veux que mon record en plein air devienne au minimum aussi haut que celui en salle, au moins passer 5m80. Après on verra, il ne faut pas se mettre de barrière. Un objectif peut aussi être une barrière si on se focalise sur une hauteur. Il faut juste s’entraîner dur et la performance viendra toute seule, sans se prendre la tête. C’est facile de parler, de dire je veux faire telle hauteur. L’objectif est d’aller le plus haut possible et si tout est en oeuvre le jour J, ça peut aller très haut. Avant, ce ne sont que des mots. Pour cet hiver, je ne me suis pas donné de hauteur vu que je ne savais pas où j’en étais et que je recommençai tout juste à m’entraîner. Maintenant, pour cet été, je sais où j’en suis et j’aimerais battre mon record en extérieur, parce que l’an dernier je me suis cassé la main ce qui m’a empêché de finir l’année correctement. J’aimerais concrétiser le travail réalisé à l’entraînement. Je ne me met pas de barrière dans la tête.


Quels sont vos objectifs de carrière ? La barre des 6 mètres, une médaille mondiale ?

Tout, je veux sauter le plus haut possible le jour J. J’ai envie de franchir 6 mètres, d’être sur les podiums olympiques et mondiaux. Il faut construire et prendre le temps, le faire par étapes et il n’y a pas de raisons que ça ne marche pas. Après, si je fais 6 mètres sans avoir de médaille, ce sera frustrant de savoir que j’ai le niveau pour avoir des médailles. Je trouve que l’un ne va pas sans l’autre. Ce sont deux joies différentes. Un podium est un immense bonheur mais quand tu bats ton record, peu importe dans quelle compétition ce soit, c’est un bonheur monstrueux. Le mieux est de battre son record le jour des championnats pour allier performance et place. Je ne peut pas choisir entre faire 6 mètres et faire un podium, je m’entraîne pour les deux. Je me battrai pour tout avoir.

Que vous manque-t-il pour avoir le niveau des meilleurs mondiaux ?

Rien. Il me manque deux compétitions. En début de saison, j’ai changé de coach, il me fallait beaucoup de temps pour m’adapter. Malheureusement, je n’ai pas réussi à avoir assez de temps en compétition. Les deux dernières compétitions m’ont procuré de belles choses mais avec mon petit traumatisme, je n’ai pas pu continuer mon concours. Je pense que j’avais le potentiel de faire quelque chose de bien. Je n’envie rien aux meilleurs mondiaux, parce que je sais que bientôt on sera « ensemble ». Je vais tout faire pour grimper sur le podium à Rio, pourquoi pas ? Je vais d’abord essayer de me qualifier, et puis on verra le jour J.

Les carrières de sportifs sont assez courtes, pensez-vous déjà à votre reconversion ?

Oui, je ne travaille pas à côté de la perche mais je prépare mon futur tranquillement pour savoir quoi faire quand j’aurais terminé ma carrière. J’ai des plans dans la tête, on construit l’avenir. Cela restera dans le monde du sport, je ne peux pas encore le dire mais j’aime le milieu du sport. Je voudrais travailler avec des sportifs, les aider à gérer leur carrière et leur après-carrière et pas uniquement des perchistes. Et puis ce ne sera pas uniquement des professionnels. En parallèle, je voudrais entraîner des jeunes car cela reste ma passion.

Quel est votre pire souvenir de perchiste ?

Peut-être ce week-end. Parce que je me suis fait assez peur, je n’ai même pas pu finir ma compétition. Je me sentais vraiment pas bien du tout, donc c’est un de mes pires souvenirs. Il y a aussi quand je me suis cassé la main l’été dernier et quand j’ai dû porter un corset pendant cinq semaines en 2014. Heureusement, j’ai plus de bons que de mauvais souvenirs.

Justement, quel est votre meilleur souvenir de perchiste ?

Il n’est pas encore arrivé je crois. Sinon, il n’y en a pas de précis, ce sont plus toutes les personnes que j’ai rencontré qui me rendent heureux dans ma vie. J’ai beaucoup de très bons souvenirs, mais mon plus beau souvenir est peut-être à venir cet été…

Entretien réalisé par téléphone le 01/03/2016

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