
@ Reuters
Les organisateurs de l’Open d’Australie ont récemment écarté une possibilité de report ou d’annulation du tournoi. Est-ce la meilleure décision à prendre alors que des violents incendies continuent de toucher une grande partie du pays ?
L’Australie en feu, Melbourne relativement épargné
Depuis plusieurs mois, les incessants feux de forêt en Australie ont déjà fait vingt-trois victimes, tué près d’un demi-milliard d’animaux et détruit six millions d’hectares de végétation. Ce qui est inquiétant, c’est que la situation ne semble pas s’arranger avec le temps et le feu touche toujours la plupart des régions de l’île. Si cette catastrophe climatique reste aujourd’hui à distance de Melbourne où doivent commencer les qualifications du tournoi dès la semaine prochaine, les risques d’une pollution liée aux microparticules dégagées par les fumées sont réels. Le tournoi Challenger de Canberra a d’ailleurs été délocalisé à Bengoro, situé 900 kilomètres au nord-ouest de la capitale australienne.
Le directeur du tournoi Craig Tiley a néanmoins assuré que maintenir le tournoi n’engendrerait pas de risque particulier pour la santé des joueurs, organisateurs et spectateurs : « Au vu des informations dont nous disposons pour le moment – avec les qualifications qui ont lieu la semaine prochaine – les prévisions sont bonnes. Nous ne prévoyons aucun retard et nous avons mis en place des mesures supplémentaires afin de garantir que l’Open d’Australie puisse se dérouler comme prévu ».
Il a également affirmé que tout est minutieusement étudié et que l’organisation gardera cette vigilance au cours du premier Grand Chelem de l’année : « Nous avons consacré des moyens supplémentaires considérables pour l’analyse, le suivi et la logistique tout au long du tournoi (…). Sur place, il y aura des experts en météo et en qualité de l’air qui analyseront tous les données disponibles en direct et évalueront en temps réel la qualité de l’air au Melbourne Park ». Alors que les matches pourront être interrompus si un niveau d’alerte élevé est détecté, le site dispose de trois courts couverts et huit courts indoor, ce qui devrait suffire pour assurer le bon déroulement de la quinzaine.
Les joueurs mobilisés
Deux des têtes d’affiche du tournoi avaient milité pour qu’un décalage de la compétition soit envisagé si la situation présentait le moindre risque. Recordman du nombre de titres à Melbourne (7), Novak Djokovic s’est exprimé sur un éventuel report de l’épreuve : « Si les conditions affectent la santé des joueurs, oui il faut y penser. Mais c’est probablement la toute dernière option à envisager, les organisateurs vont essayer de faire tout ce qu’ils peuvent pour ne pas reporter car il y a un calendrier à respecter et beaucoup de choses sont en jeu. Mais la santé est une préoccupation pour moi et pour tout le monde ».
Le tennis n’est qu’un sport, il y a des choses beaucoup plus importantes qui se passent en ce moment.
Ashleigh Barty, n°1 mondiale
Une option partagée par la numéro un mondiale et locale du tournoi, Ashleigh Barty. Elle estime que le sport n’est pas la priorité dans cette situation et que les organisateurs doivent penser en premier lieu à la santé de tous : « Le tennis n’est qu’un sport, c’est un jeu, il y a des choses beaucoup plus importantes qui se passent en ce moment et dont il faut qu’on se préoccupe en Australie. Si on décale l’Open d’Australie de quelques jours, ça n’a aucune espèce d’importance. Ce qui compte, c’est que les Australiens soient en sécurité. Oui, on adore ce jeu, oui nous sommes les plus professionnels possible et nous donnons le maximum, mais ce n’est qu’un jeu. Il faut mettre les choses en perspective et se préoccuper des choses les plus importantes de la vie d’abord ».
Nick Kyrgios semble aussi très touché par la catastrophe que subit son île en ce moment. Il s’est engagé à verser des fonds pour les diverses victimes de ces incendies, à savoir 200 dollars par ace réalisé jusqu’à la fin du mois, une opération reprise par plusieurs joueuses et joueurs du circuit. Ils seront également plusieurs (Nadal, Federer, Kyrgios, Tsitsipas, S.Williams, Wozniacki, Osaka) à jouer des exhibitions en faveur des victimes ce des incendies. Lorsqu’il a été interrogé sur son initiative après sa victoire pour l’Australie en ATP Cup, Kyrgios n’a pu retenir ses larmes : « Ma ville natale Canberra doit avoir l’air le plus toxique au monde en ce moment, c’est assez triste. (…) Ça ira pour toutes les familles, les pompiers, les animaux, tous ceux qui perdent des maisons, des familles. C’est plus important que le tennis ».
Le casse-tête d’un report
Retarder le Grand Chelem ou pire, l’annuler, aurait de lourdes conséquences pour l’organisation du tournoi et de la saison, même si la santé des Australiens doit demeurer la priorité absolue. Comme l’a soulevé Novak Djokovic, reporter la compétition entraînerait un décalage de tout le calendrier ce qui serait un énorme casse-tête pour l’ATP aussi bien que pour les organisateurs de l’Open d’Australie. Sans même parler des retombées économiques catastrophiques qu’une annulation ou qu’un simple report engendrerait sur les finances du tournoi.
Brisbane accueille en ce moment un tournoi WTA et l’ATP Cup qui se dispute aussi en parallèle à Perth et Sydney. Et pour le moment, rien n’empêche le bon déroulement des compétitions dans ces régions touchées par les feux même si l’air de Sydney s’est dégradé ces dernières heures. D’autres tournois doivent aussi avoir lieu la semaine prochaine à Adelaïde et Hobart. Au-delà des questions morales, rien ne pourrait donc empêcher la tenue de l’Open d’Australie a priori mais il reste tout de même à savoir si Melbourne est certain d’être épargné pour les trois prochaines semaines. Dans l’hypothèse extrême d’une annulation, ce serait la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale qu’un tournoi du Grand Chelem ne pourrait se jouer.